Données COVID-19

Quelques visualisations

La crise que nous traversons est aussi l’occasion de mettre à profit de nombreuses techniques de visualisations des données et de machine learning. Les données de Santé publique France que j’ai utilisées sont téléchargeables [ici] (https://www.data.gouv.fr/fr/datasets/donnees-hospitalieres-relatives-a-lepidemie-de-covid-19/). La représentation ci-dessous montre le nombre d’hospitalisations liées au COVID-19 comptabilisées chaque jour par région :

L’animation suivante montre le nombre d’hospitalisations par jour liées au COVID-19 dans 3 départements très touchés et 3 départements peu touchés (choisir la vue ‘Ranks’ pour mieux voir ces derniers) :

C’est aussi l’occasion de se souvenir du principe d’ intégrité graphique d’Edward Tufte : sans que l’intention soit malhonnête, un graphique peut déformer notre perception des données. Le graphique ci-dessous montre le nombre de décès du COVID-19 (à partir du moment où le 10e décès est survenu) dans les 9 pays les plus touchés (données de l’[Université Johns Hopkins] (https://data.humdata.org/dataset/novel-coronavirus-2019-ncov-cases)) le 2 avril 2020. La représentation de gauche (celle trouvée dans la presse) montrait la France dans le tiers supérieur, non loin de l’Italie, alors que les chiffres sont très différents (FR: 4043 IT: 13155). L’échelle logarithmique “écrase” par définition les valeurs élevées mais permet de mieux distinguer les courbes des pays ayant des valeurs plus basses. A l’inverse, la même figure avec une échelle linéaire (graphe de droite) reflète plus fidèlement les chiffres bruts. On y voit clairement qu’il y a 3 fois plus de décès en Italie qu’en France. Chaque version est un compromis. Comme dans de nombreux domaines de la perception humaine, l’échelle logarithmique se rapproche peut-être davantage de la manière dont nous “ressentons” ces chiffres.

![linVsLog] (linVsLog.png)

Le graphique suivant montre le lien entre la population d’un département et le (logarithme du) nombre de décès liés au COVID-19 enregistrés. La courbe bleue matérialise l’équation qui résume au mieux ce lien :

logarithme-nombre-décès = 0,098 × nombre d’habitants0,293

![popVsDC] (lienPopDC.png)

Le cartogramme de diffusion1 est une représentation que j’aime particulièrement. Dans celui-ci, j’ai déformé les régions de France métropolitaine de sorte que la taille des régions reflète le nombre d’hospitalisations au 7 avril 2020 :

![cartogramme] (cartogram.png) Sans surprise, l’Île de France (en orange clair) occupe une bonne partie de l’espace, ainsi que la région Grand Est (en vert).

Les méthodes de l’intelligence artificielle (en particulier, le deep learning) sont également mises à contribution. Ce qui suit n’a absolument aucune valeur médicale2 mais n’est pas dénué d’intérêt pédagogique. J’ai confié à un réseau de neurones convolutif la tâche d’apprendre automatiquement la disctinction entre radiographies du thorax montrant des cas de COVID-19 et radiographies du thorax de patients3 sans pathologie (115 images de chaque). Sur cet ensemble limité, l’algorithme parvient à distinguer les deux types de radiographies dans 100% des cas. La méthode Grad-CAM met en surbrillance les régions des images sur lesquelles l’algorithme s’appuie pour faire sa classification :

![gradCamRadio] (gradCamRadio.png)

  • Avec ce type d’algorithme, on retiendra que l’expert humain n’a pas à dire ce qu’il doit aller chercher dans l’image ; il s’en charge tout seul 👍

  • C’est le même algorithme qui peut être utilisé tel quel dans des domaines très variés ; nous l’avons utilisé pour l’étude de la prononciation dans cette publication, et dans celle-là 👍

  • Grad-CAM et les méthodes assimilées permettent de comprendre les choix de l’algorithme 👍, montrant parfois (comme dans notre publication ici) qu’il peut prendre de bonnes décisions pour de mauvaises raisons 👎


  1. Gastner MT, Seguy V, More P. Fast flow-based algorithm for creating density-equalizing map projections. Proc Natl Acad Sci USA 115(10):E2156–E2164 (2018). ↩︎

  2. D’abord et surtout parce que je ne suis pas médecin. Ensuite, mon échantillon est de taille limitée. Et puis cela n’a pas été soumis à la critique de plusieurs experts (condition absolue pour toute étude scientifique). Et enfin, parce que je soupçonne fortement un biais dans les données. ↩︎

  3. Les données COVID proviennent de ce site d’où je n’ai extrait que les vues postéro-antérieures. Les images de sujets sains ont été extraites de façon aléatoire de cet ensemble de données↩︎

Emmanuel Ferragne
Emmanuel Ferragne
Professor of Phonetics